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vendredi 4 septembre 2009

853 - Mademoiselle Léontine

D'une chasteté extrême, la sévère Léontine -dite mademoiselle Léontine- ne vivait que pour la vertu.

A cinquante ans, elle n'avait embrassé que le crucifix du curé, détestant aussi maladivement les enfants que les hommes, bien que son chignon baroque et quelques autres détails de sa toilette pussent laisser supposer que si elle n'avait pas représenté cette infâme bigote avariée, elle aurait été la plus parfaite incarnation de la vieille putain.

Avec ses allures de coquette déjà bien ridée, son air strict et ses souliers immodestes, son rouge à lèvres criard que venait contredire son corsage hermétiquement, radicalement, définitivement clos, ses ongles vernis aux reflets vulgaires contrastant avec ses chapelets austères, oscillant entre gouffre et ciel elle évoquait autant la maquerelle que la sainte.

Jouant sur l'ambigüité des apparences, mademoiselle Léontine aimait semer le doute chez certains pour mieux faire triompher la "vérité".

La vertu, son credo... Ses journées de rentière employées à faire grandir cette flamme suspecte se résumaient, hors de ses heures de bénévolat, à des allées et venues entre son foyer d'éternelle célibataire et l'église, à des visites pieuses chez les malades mais aussi à des "missions de surveillance" de ses voisins. Et pour tout dire, du village entier. De temps à autre elle aimait rôder dans le cimetière.

Elle ne se ménageait pas pour rendre service, ne comptant ni son temps ni les frais personnels (usant non sans perversité du pouvoir que lui conférait sa fortune) afin que nul n'ignorât ses grandes qualités morales...

Cependant une cause suprême la tourmentait, tournait à l'obsession, et même à la rage haineuse : sa chasteté. Elle se glorifiait sans pudeur de son ignorance de l'ivresse charnelle. Toutes les occasions étaient bonnes pour se vanter de ses moeurs irréprochables. Même les funérailles de ses vieilles "amies" servaient de prétexte à l'expression publique de sa chasteté, l'éloge funèbre des défuntes tournant rapidement à l'éloge d'elle-même et de son hymen demeuré intact.

Tout ce qui pouvait faire songer à un phallus la troublait, aussi détournait-elle honteusement le regard devant les cierges à la messe, certaines cucurbitacées voire tels champignons chez son moustachu d'épicier, les gros cigares que fumait le prêtre de la paroisse qu'elle trouvait séduisant dans sa robe noire, la clé à molette du musculeux cantonnier ...

Sa terreur du symbole viril, son zèle dans le refus de cette "horreur" comme elle disait, trahissaient comiquement ses irrépressibles attirances...

Un jour le bedeau lui montra ce qu'elle aurait souhaité ne jamais voir.

Et ce qu'elle vit, qui la toucha, qui la retourna était si énorme, si adroit, si bon, juste et vrai, bref si impie qu'elle se convertit...

Mademoiselle Léontine s'est débarrassée de ses missels, chapelets, crucifix et autres signes de fausse honnêteté ayant si longuement alimenté sa vanité. Devenue humaine par la seule vertu d'une "charnelle ouverture de cœur", aujourd'hui elle se consacre avec sincérité et vraie humilité au bien-être d'autrui, authentiquement préoccupée du sort de son prochain, aimée de tous.

13 commentaires:

  1. Cher Raphaël,
    Ton histoire serait crédible si tu n'avais pas ajouté un paragraphe pour le "happy end".
    En effet, l'hypocrisie est le moteur de la civilisation: ceux qui commencent tous leurs discours par "Honnêtement, je pense que..." sont souvent des politiciens sans scrupules, désirant uniquement endormir leur auditoire.
    Amitiés

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  2. "l'hypocrisie est le moteur de la civilisation"

    De la société, pas de la civilisation, abruti corrompu va.

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  3. Et plus si affinité4 septembre 2009 à 09:47

    Mon sieur Raphaël Zacharie de Izarra,

    Le portrait de Mademoiselle Léontine est joliment dépeint. Nombre de bigotes, de culs-bénis, de fesses serrées, en extrapolant modérément, devraient s'identifier à cette libéllule.
    La majorité des femmes quoi...

    J'ai ri au pudique : " "charnelle ouverture de cœur","

    Les vacances vous ont réussi Rafounet. Gardez le cap !!!

    Cul Cure Bite Assez

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  4. Concombre Masqué5 septembre 2009 à 07:36

    "Tout ce qui pouvait faire songer à un phallus la troublait"

    Je la comprends, parole de femme ! chaque fois que j'achète un concombre, je ne peux m'empêcher de penser, quand je le tâte pour voir s'il est bien ferme, bien dur, que ça ferait un bon godemiché écolo. Mangez des légumes !

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  5. Plus vulgaire que concombre de supermarché masqué, tu meurs.

    *vomit*

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  6. Anonyme,

    Votre ignorance de la vulgarité n'est plus à prouver au lu de votre commentaire.

    Je vous cite un exemple de vulgarité, de langage de caniveau, ou plus modestement, une hideuse imitation de réplique célèbre de film de troisième, voire quatrième, cinquième zone : "Plus vulgaire que concombre de supermarché masqué, tu meurs."
    Ce n'est pas parce que l'on va écrire des mots étiquetés gros " bite, cul, god, chatte" que le texte ou commentaire va ressortir vulgaire.
    Le talent de l'écriviste est de judicieusement agencer et s'amuser de TOUS les mots. Faut-il encore que ce dernier possède un richissime, capitaliste vocabulaire...

    Verge en Berne

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  7. Bitte Dame a rage7 septembre 2009 à 03:13

    "T'es une grosse débile toi Eve et Lard Entré, pas vrai ?"
    "Faut vraiment être conne ou asexuée pour pas comprendre ça"
    "Plus vulgaire que concombre de supermarché masqué, tu meurs."
    *vomit*

    Oui, cette personne qui me vomit a un vocabulaire très riche et très a-varié qui se passe de commentaires. C'est déjà lui accorder trop d'intérêt qu'il ne mérite pas que d'y prêter attention, et ce n'est pas ça qui va enrichir notre vocabulaire !

    "Si les cons n'existaient pas, il ne faudrait surtout pas les inventer" (Frédéric DARD)

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  8. Cucu rebite assez !7 septembre 2009 à 04:13

    Passons plutôt à la rubrique nécro du jour : Sim est mort. Un comédien discret, qui ne se prenait pas au sérieux, il était simple, humain, sincère, intègre. Il avait joué avec Annie Girardot dont on parlait la dernière fois dans "Elle boit pas elle fume pas..." Il me faisait marrer quand j'étais ado avec ses interprétations de chansons "à la con" : "la libellule", "j'aime pas les rhododendrons", "c'est bien moi la plus belle". J'aimais bien ce personnage, je le trouvais attachant, j'aimais son sens de la dérision, sans prétention. Il y en a ici qui seraient bien inspirés de suivre son exemple, ces gens aigris qui trouvent toujours à redire et qui feraient mieux de voir le concombre géant dans leurs yeux que le petit cornichon dans l'oeil de l'autre (variante de la poutre et de la paille, autres symboles phalliques, pour la poutre du moins).

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  9. La comtesse de la tronche en biais7 septembre 2009 à 07:16

    Comme à mon habitude, j'ignorais la mort de Sim. Il fait parti des personnages télévisuels que j'aimais bien. Au même titre que Jacqueline Maillant, et l'irremplacable tragédienne/comédienne Alice Sapritch (géniale dans "la folie des grandeurs")
    Ces artistes célèbres et talentueux chacun avec leur particularité, ont pratiquement tous mangé de la vache enragée avant d'être connu et reconnu du plus grand nombre. Ne serai-ce que Sim et Alice de par leur physique "on ne peut pire". Ils n'ont pas dû rire tous les jours lorsqu'ils étaient enfants, puis ados, enfin jeunes adultes, dans la cour de récréation sans pitié qu'est la société. De leur "laideur" ils s'en sont servi comme fond de commerce. Et quel commerce ! Le plus difficile ! Ils savaient rire, toutefois jouer, de leur "laideur/malheur" mais plus talentueux encore, ils nous l'ont fait reconsidérer. Lorsqu'ils jouaient, ils devenaient beaux !

    C'est à cela qu'on reconnait en partie l'artiste talentueux. Lorsqu'il joue, lorsqu'il écrit, lorsqu'il peint, lorsqu'il sculpte, le voyeur réflectif se mue en lui.

    C'est probablement ce qui manque à beaucoup "d'artistes" de la nouvelle génération. Ils ne mangent pas suffisamment de la vache folle et fument pas assez de racines de pissenlits. Lorsque l'on sait que de nos jours, pour le moindre petit "allo maman bobo. Moi vouloir Aspro", physique ou mental, nos gentilles et jolies petites têtes blondes (jusqu'après la crise de la quarantaine environ...) nous prennent la tête avec leur soi-disant talent à la mord-moi-le-noeud, il y a de quoi se tordre de rire...de désespérance:

    Tout part en couillette ! l'humain en priorité. Le talent, force oblige, suit

    Crise en thème

    Puisque je suis de passage, j'en profite pour corriger l'écrit vulgaire. Un petit pronom par là, un petit signe hiéroglyphe par ci, et à mort familiarité (vulgarité...)

    "Faut vraiment être conne ou asexuée pour pas comprendre ça"
    CORRECTION
    IL faut vraiment être "conne" ou asexuée pour NE pas comprendre cela.

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  10. Debby Hill et l'hareng très...7 septembre 2009 à 19:16

    On peut aussi dire la même chose avec des mots plus avantageux (le dictionnaire est permis, voire recommandé, pour ceux qui manquent de vocabulaire et de synonymes)

    Ainsi le très primaire :
    "T'es une grosse débile toi Eve et Lard Entré, pas vrai ?"

    Peut devenir le plus distingué :
    "N'auriez-vous pas une faiblesse de grande envergure relative à vos facultés intellectuelles, chère Eve et Lard Entré ?"

    Il y a une façon de dire les choses, bordel de merde.

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  11. "T'es une grosse débile toi Eve et Lard Entré, pas vrai ?"


    Je m'autorise Eve et Lard Entré de souligner votre défaillance morale. Qu'en pensez-vous malodorante Urine de Vermine ?

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  12. Madame Uhrine de Vertmines9 septembre 2009 à 20:49

    "Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,
    A cette horrible infection,
    Etoile de mes yeux, soleil de ma nature,
    Vous, mon ange et ma passion!

    Oui! telle vous serez, ô la reine des grâces,
    Après les derniers sacrements,
    Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses,
    Moisir parmi les ossements."

    Baudelaire - Les Fleurs du Mal (1857), Une charogne

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  13. Il faut être toujours ivre, tout est là ; c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve.

    Mais de quoi? De vin, de poésie, ou de vertu à votre guise, mais enivrez-vous!

    Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge; à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est. Et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront, il est l'heure de s'enivrer ; pour ne pas être les esclaves martyrisés du temps, enivrez-vous, enivrez-vous sans cesse de vin, de poésie, de vertu, à votre guise.

    L'inégalé et irremplaçable "Charlot" (plus maousse costaud que Victor...)

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